Critiques

Critique de Final Fantasy XVI : faut-il s’en rappeler un an plus tard ?

Final Fantasy XVI est disponible depuis près d’un an. Cette critique est donc légèrement en retard. Depuis le trailer d’annonce du jeu en 2020, je l’attendais de pied ferme. Il semblait avoir absolument tout ce que je désirais. Un retour à la fantaisie médiévale, un ton un peu plus sombre, un doublage anglais de qualité, et un système de combat digne de ce nom. Le fait que ce dernier opus dans la très prestigieuse lignée des Final Fantasy était produit par nul autre que Naoki Yoshida, aussi connu sous le nom de Yoshi-P, me donnait beaucoup d’espoir pour ce titre.

Trailer d’annonce de Final Fantasy XVI

Il est important de préciser que je ne suis pas un fan invétéré de la série. Avant le 16ème, mon expérience avec Final Fantasy se limitait à Final Fantasy XIV, le MMORPG dont Yoshi-P est justement le producteur et directeur. D’où mon respect pour son travail. J’ai ensuite suivi chaque coup de communication autour du jeu de très près. 

Je me souviens être particulièrement intéressé par l’univers de Valisthea (la ou se déroule l’histoire de Final Fantasy XVI) pour ses intrigues politiques à la Game of Thrones, et les fameux Émissaires, des êtres humains capables de faire appel aux pouvoirs des Primordiaux (aussi connus sous le nom d’invocations dans les autres jeux Final Fantasy) servant de véritables armes de destruction massive aux nations ayant la chance d’en posséder un. “Ce jeu est fait pour moi” j’avais osé pensé. 

Ainsi, le jour J était enfin là. Le 22 juin 2023, Final Fantasy XVI était enfin entre mes mains. Le jeu, a-t-il su répondre aux standards impossibles à atteindre auxquels je l’avais soumis pendant tout ce temps ? Je vous gâche la surprise, il ne l’a fait qu’à moitié. Final Fantasy XVI représente parfaitement le terme anglo saxon “peaks and valleys” (des sommets et des vallées). Ce qui veut dire que c’est un jeu avec de très grands moments, et d’autres moins mémorables. Mais ce sont ces moments, bons et mauvais, qui rendent cette critique aussi intéressante à écrire. Mais avant tout, Final Fantasy XVI, qu’est-ce que c’est ?

L’hégémonie des cristaux

Final Fantasy XVI est le dernier jeu dans la très longue série des Final Fantasy, développés et édités par Square Enix. Dire qu’il s’agit d’un des noms les plus influents dans l’industrie du jeu vidéo n’est pas exagéré. A chaque nouvel opus, Square Enix tente de faire évoluer la série dans une direction différente, et ils peuvent se le permettre. Après tout, chaque jeu Final Fantasy se déroule dans un univers différent. Vous n’avez donc pas besoin d’avoir joué aux précédents pour profiter pleinement de celui-ci.

Les seules similitudes qui se transmettent d’un Final Fantasy à l’autre sont les noms des créatures et de certains personnages que vous rencontrerez dans cette série. Il y a aussi toujours une histoire de cristaux, et FF16 ne déroge pas à la règle. Notre récit se déroule dans le monde de Valisthea. Une terre ravagée par un conflit pour le contrôle des cristaux mères, d’immenses formations cristallines permettant aux habitants de ce monde d’utiliser la magie nécessaire à leur survie. Un peu comme du pétrole pour nous, mais en plus cool. 

Exploration de la république de Dalméquie, aux cotés de Jill et Talgor

Sous ces cristaux mères se sont développées différentes nations, et chacune d’entre elles ont leur propre culture, et Émissaire capable de faire appel au pouvoir d’un Primordial. En ce qui nous concerne, c’est l’Archiduché de Rosalia qui nous intéresse. Vous incarnez Clive Rosfield, fils aîné de l’archiduc et frère de Joshua Rosfield, Émissaire de Phénix, le primordial de feu. En tant que Gardien de Rosalia, Clive a pour devoir de protéger son petit frère coûte que coûte. Pour ce faire, il reçoit la bénédiction du Phénix et peut faire appel à une partie de ses pouvoirs. Seulement, une tragédie frappe les deux frères lorsque l’Archiduché est attaqué par un deuxième Émissaire de feu nommé Ifrit. Clive se lance alors dans une dangereuse quête de vengeance à la recherche de ce mystérieux primordial. C’est tout pour les grandes lignes de l’histoire. 

Vous suivrez cette trame principale en regardant beaucoup de cinématiques, donc si vous y êtes allergique, bonne chance à vous. La narration est un point central de Final Fantasy XVI, et j’ai apprécié l’histoire dans sa globalité. Clive est un personnage très attachant et le voir évoluer au fil de son aventure est un plaisir. Il faut également saluer le doublage anglais qui rend l’expérience encore meilleure. Ben Starr a su insuffler la vie à notre protagoniste avec brio, toutes les émotions y sont palpables. Si vous comptez y jouer, ne passez pas devant ce doublage de qualité. Sans compter le fait qu’il s’agit du doublage d’origine du jeu.

Un jeune Clive accompagné de Jill Warrick et leur chien Talgor

Malheureusement, je n’ai pas trouvé les autres personnages présents au long de l’aventure aussi développés. À l’exception peut-être de Jill Warrick, héroïne principale du jeu qui suivra Clive lors de ses périples. Elle a ses moments, et elle reçoit un développement plus important que d’autres, mais cela reste assez maigre sur une quarantaine d’heures de jeu. J’ai fini par comprendre que l’histoire parle de Clive, et c’est tout. Si on n’aime pas Clive, il sera difficile d’accrocher à la proposition narrative qu’offre Square Enix avec ce 16ème opus. 

Cela ne veut pas dire que le jeu n’a pas d’autres personnages mémorables, ou de bons moments de caractérisation en dehors de notre protagoniste. Evidemment, je préfère vous laisser découvrir ça par vous même. Vous voulez savoir ce qui est malheureusement encore plus mémorable ? Le rythme infernal de cette narration. 

J’ai beau avoir apprécié l’histoire dans certains de ses aspects, j’ai tout de même eu du mal avec le rythme auquel elle avançait. Avant sa sortie, Yoshi-P décrivait Final Fantasy XVI comme un tour en montagnes russes. C’était une très bonne comparaison, car vous allez très souvent passer de moments absoluments grandioses à des passages beaucoup plus creux et ennuyeux.

Pour avancer dans l’histoire, vous serez obligé de vous farcir des séries de quêtes vous demandant de vous occuper de tâches sans intérêt, et qui n’avaient vraiment pas besoin d’exister. Tout ça pour pouvoir enfin arriver aux moments intenses qui rendent ce jeu spécial. À la longue, c’est vraiment usant, et je me demande si Final Fantasy XVI n’aurait pas été meilleur plus court. Pour moi, ces moments qui ralentissent le rythme du jeu, ne sont rien d’autre que du remplissage, et ils n’étaient absolument pas nécessaires. Ils ne font que se mettre entre vous, le joueur, et les meilleurs moments du jeu : l’action.

Devil May Clive

Final Fantasy XVI va vous demander de vous battre. Beaucoup vous battre. Cette fois, la license devient un véritable jeu d’action en temps réel. Pas de tour par tour, pas de système hybride à mi-chemin entre action et tour par tour avec une jauge ATB. Ici, c’est la vraie bagarre. C’est un pari risqué qui emmène la série encore plus loin dans la direction qu’elle essaye de prendre depuis plusieurs années maintenant. Et pour faciliter cette prise de risque, Square Enix a engagé un spécialiste des jeux d’action : Royta Suzuki.

Il est connu pour son travail sur Marvel vs Capcom 2, Dragon’s Dogma, Monster Hunter : World et surtout, Devil May Cry 5. Ces jeux signés Capcom sont tous appréciés pour leurs gameplay action particulièrement soigné, et fort heureusement, Final Fantasy XVI reçoit un traitement similaire. Même si on est accompagnés par d’autres personnages lors de notre aventure, il est impossible de les contrôler. Ils agiront de leur propre chef à l’aide d’une IA. Vous pourrez cependant donner des ordres à votre fidèle compagnon à quatre pattes, Talgor. Il est capable de vous soigner, et vous aidera à pourfendre vos cibles.

C’est un autre changement qui s’éloigne de ce que Final Fantasy fait d’habitude, et pour cause. Le but est de laisser Clive briller pleinement en tant que personnage de jeu d’action, et de lui donner accès à un panel de capacités aussi large que possible. Pourquoi prendre le contrôle d’un autre membre du groupe tel que Jill ou Cid, alors que notre protagoniste peut tout faire ? Pour revenir à Ryota Suzuki, il considère le système de combat de Final Fantasy XVI comme son “chef d’oeuvre personnel”. Manette en main, je comprends pourquoi il pense ainsi. Contrôler Clive procure un sentiment de puissance palpable, sans doute grâce au game feel extrêmement maîtrisé dont le jeu peut se vanter. 

On le ressent à chaque coup d’épée, esquive, parade ou capacité utilisée. Les animations sont fluides et nerveuses, les effets sonores ont de l’impact, et si vous ajoutez à cela les vibrations de la manette PS5, vous avez un cocktail explosif. Le jeu laisse également place à l’expérimentation via des capacités variées et toutes très différentes. Vous les débloquerez tout au long du jeu, au fur et à mesure que vous affronterez des Émissaires et leur Primordiaux. 

Vidéo explicative détaillant le système de combat de Final Fantasy XVI

En effet, les capacités mises à votre disposition sont inspirées des invocations iconiques de la série. Phénix par exemple possède un arsenal varié et simple à utiliser, parfait pour des néophytes du genre, Garuda vous donne accès à des frappes rapides visant à détruire la jauge de posture de vos adversaires, et Titan s’oriente plus vers la défense et les dégâts. Le jeu mérite son surnom de “Devil May Clive”. Sur le papier, tous ces points positifs devraient suffire à créer une expérience de gameplay plus que mémorable. 

Seulement, le jeu est beaucoup trop facile pour permettre à ce système de combat de briller comme il le devrait. Sans difficulté, le joueur n’a tout simplement aucune raison de mettre à profit les outils que le jeu met à sa disposition. Ce n’est pas tout à fait le cas si vous jouez au mode arcade inclus avec le jeu qui vous donne un score selon votre performance. Mais si ce type de contenu optionnel ne vous intéresse pas, vous ne trouverez absolument aucun challenge dans Final Fantasy XVI. En revanche, ce que vous êtes sûrs d’y trouver, c’est du grand spectacle.

Spéctacle son et lumière

Au fil de votre aventure, vous prendrez part à ce que les développeurs de Final Fantasy XVI appellent “les combats de Primordiaux”. Ces duels titanesques vous permettent de contrôler votre propre Primordial, et d’affronter celui d’un autre Émissaire. Ces moments de gameplay ont assez de variétés pour rester excitants tout au long du jeu. Certains s’apparentent à des combats de catch, d’autres ressemblent à des jeux de tirs à la Panzer Dragoon. C’est lors de ces moments bourrés d’adrénaline que Final Fantasy XVI arrive au sommet de sa virée en montagne russe, et offre des séquences d’action qui feraient rougir God of War et Asura’s Wrath, le tout accompagné par la musique de Masayoshi Soken. 

Vidéo donnant un aperçu des combats de Primordiaux

Je ne préfère pas trop m’étaler la dessus, car découvrir ce que ces moments ont à offrir est un des plus grands plaisirs que j’ai pu ressentir durant mes 40 heures de jeu. Croyez-moi, vous n’avez rien vu d’aussi spectaculaire dans un jeu vidéo triple A. C’est à peu près tout en ce qui concerne le contenu principal du jeu. Qu’en est-il du contenu annexe ? 

Les à-côtés

Final Fantasy XVI adopte une structure semi-open world. En dehors des missions vous permettant d’avancer dans la trame principale qui s’apparentent à des stages qu’on retrouverait dans un Devil May Cry, le jeu vous laisse le choix d’explorer des zones un peu plus larges pour y trouver des objets cachés, et effectuer des quêtes secondaires. J’ai personnellement trouvé la qualité de ce contenu très pauvre. 

On est vraiment sur des quêtes Fed-Ex à l’ancienne sans intérêt, et après en avoir fait quelques unes, j’ai décidé de les ignorer complètement. J’ai cependant apprécié les contrats de chasse, qui vous demande de vous débarrasser d’un monstre plus ou moins coriace. Certains de ces contrats en valent la peine. Malheureusement, je pense tout de même que si vous êtes fan du contenu secondaire dans les Final Fantasy, vous ne trouverez probablement pas votre compte dans celui-ci. Je pense que ce 16ème opus a un peu le cul entre deux chaises.

D’un côté, il veut devenir un jeu d’action. Mais de l’autre, il veut continuer de faire plaisir aux fans de la série en s’efforçant tant bien que mal à garder des éléments RPG dans son game design. Dans les faits, il n’est pas impossible de réussir à mélanger ces deux écoles. Après tout, certains des jeux les plus populaires de tous les temps sont des “action-rpg”. Mais dans le cas de Final Fantasy XVI, c’est très loin d’être une réussite. 

On l’observe dans la narration linéaire que le jeu adopte, loin de ce qu’on attend d’un jeu de rôle, mais aussi dans la sauce rpg inutile qui englobe l’équipement que l’on peut obtenir au long de notre aventure. Que ce soient les nombreuses épées qui n’apportent rien de différent à part des points de dégâts supplémentaires, ou les anneaux et autres babioles qui ne font eux aussi que gonfler votre force de frappe. 

Tout ça est beaucoup trop faible pour prétendre faire de l’action-rpg, et je pense que Final Fantasy XVI aurait été bien plus mémorable s’il avait choisi un seul genre plutôt que d’essayer de faire plaisir à deux publics.

Le verdict final

Si vous aimez les jeux d’action, vous risquez d’apprécier ce que Yoshi-P et son équipe ont tenté avec Final Fantasy XVI. C’est un jeu qui prend des risques et qui essaye de sortir du moule de la série de Square Enix. L’histoire, même si lourde par moments, a du cœur. Le gameplay, même si il est trop facile, offre des affrontements satisfaisants et met beaucoup d’outils à la disposition du joueur. Et quand le jeu laisse place au spectacle, peu de concurrents peuvent s’asseoir à sa table. Vous l’aurez compris, Final Fantasy XVI est un jeu inégal et inconsistant qui essaye de faire plaisir à tout le monde. Il est cependant possible d’y trouver pas mal de plaisir, malgré ces inconsistances. Je suis sûr d’y rejouer à la sortie de la version PC.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *